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L'Escarmouche, no 1, 12 novembre 1893, première de couverture illustrée par Henri-Gabriel Ibels
Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Jean-Louis Losi)
Droits : Réservés
L'Escarmouche
L'Escarmouche
L’Escarmouche est un hebdomadaire illustré créé en 1893 et dirigé par l’écrivain antimilitariste et contestataire Georges Darien (1862-1921), qui fut l’unique rédacteur (sur ce point voir André Breton, « Darien le maudit », Arts, 11 mai 1955) de la publication éphémère de onze livraisons parues entre le 12 novembre 1893 et le 16 mars 1894. Proche de Zo d’Axa (voir ici), Darien s’est exilé en août 1894 en Angleterre afin d’échapper à la répression qui a frappé les milieux anarchistes.
Pleine d’esprit et d’autodérision, la déclaration d’intention publiée dans le premier numéro de L’Escarmouche, déconcerte en affirmant ne pas formuler de promesses et ne défendre aucune conviction : « La politique nous effraye, la littérature nous fait peur, les théâtres nous sont fermés, la médecine nous est inconnue, la finance nous est étrangère et les beaux-arts sont à M. Poincaré. Nous nous occuperons peut-être, tout de même, à l’occasion, de toutes ces choses, mais simplement, pour tuer le temps, parce que l’on ne peut point passer toutes ses journées au café, mais – nous en prévenons nos lecteurs – absolument sans conviction ». Feignant le reproche, un paragraphe est ensuite consacré à l’illustration : « Ses dessinateurs, gens de goûts bizarres et d’instincts indépendants, n’ont pu arriver à comprendre encore que l’unité d’action faisait la force principale d’un journal. Ils n’ont point l’air de se douter qu’un dessin doit être fait, avant tout, pour illustrer un texte et même – si j’ose dire toute ma pensée – pour le corroborer. Ils prétendent faire absolument ce qui leur plaît, et rien que ce qui leur plaît. Aucun bon raisonnement n’a pu, jusqu’à présent, vaincre leur obstination sur ce point. »
Ainsi, sans lier leurs illustrations au contenu des textes, les « dessinateurs prennent appui dans leur travail sur la réalité qui les entoure, portant une même attention à la vie quotidienne, souvent saisie sous un angle humoristique : en quoi leurs œuvres sont en accord avec la conception artistique de Darien, qui milite pour un art en prise sur le réel », comme le relève Luce Abélès dans son article très complet consacré au journal (Luce Abélès, « L’Escarmouche de Georges Darien, novembre 1893-janvier 1894 », La Revue des revues, no 31, 2002, p. 15). Chaque numéro, composé de huit pages, compte trois, voire quatre illustrations, couverture comprise. Au total, douze sont de Toulouse-Lautrec, seul artiste représenté dans chacune des livraisons, sept d’Henri-Gabriel Ibels, six de Hermann-Paul, trois de Pierre Bonnard, trois de Félix Vallotton, une d’Adolphe Willette et une de Louis Anquetin. À l’exception de Dessin illustrant le catalogue de la maison Kleinmann, de Willette, et d’une gravure sur bois de Vallotton –, toutes sont des lithographies inédites, réalisées expressément pour L’Escarmouche, où elles sont reproduites en pleine page par procédé photomécanique. Le journal commercialisera les tirages originaux, signés et numérotés. Dans le deuxième numéro, on lit : « Nous sommes heureux d’annoncer aux amateurs que, par suite d’une entente avec nos dessinateurs, nous sommes en mesure de leur procurer les lithographies originales, tirées à cent exemplaires seulement, signées et numérotées par l’artiste, des dessins parus dans L’Escarmouche. Ces lithographies seront mises en vente, aux bureaux du journal, au prix de 2 fr. 50 et expédiées franco contre 2 fr. 75. » Ainsi que le précise Luce Abélès, « ce tirage de luxe répond à un double objectif : rétribuer les artistes et diffuser leur production, dont la valeur artistique est ainsi affirmée, auprès des amateurs » (Luce Abélès, « L’Escarmouche de Georges Darien, novembre 1893-janvier 1894 », La Revue des revues, no 31, 2002, p. 13).
Un « choix d’estampes originales » de L’Escarmouche, dont deux de Vallotton, sera exposé en 1894 au premier Salon de La Libre Esthétique (La Libre Esthétique. Catalogue de la première exposition, Bruxelles, Musée moderne, 17 février–15 mars 1894, nos 473-483).
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Non signé, « Nouveaux illustrés à signaler / L'Escarmouche », Le Livre & l'image. Revue documentaire illustrée mensuelle, no 10, décembre 1893, pp. 337-338
St-James, 1979, [p. 6]
Luce Abélès, « L'Escarmouche de Georges Darien, novembre 1893-janvier 1894 », La Revue des revues, no 31, 2002, pp. 3-19
La publication est consultable sur Gallica.