No catalogue 072001
Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Philipp Hitz)
Droits : Réservés
Sans titre [Il est innocent]
Sans titre [Il est innocent]
Autonome
La lithographie de Vallotton, suivant l’ordre alphabétique des noms des artistes, est la dernière planche de l’album Hommage des artistes à Picquart paru en janvier 1899. Le dessin préparatoire (fig. A) est inscrit de la main de Vallotton : « Les nuits de M. Méline », annotation pensée comme un titre, mais elle sera finalement abandonnée conformément à l’ensemble des lithographies, qui ne sont pas titrées.
Pour l’interprétation de ce dessin, nous nous en remettons à l’analyse exhaustive de Nadia Fartas parue en 2019 : « On s’attachera particulièrement à la planche de Vallotton qui clôt l’album : le domaine du symbole et de l’intimité prévaut sur celui de l’allégorie et de l’histoire. La répartition expressive du noir et du blanc, la simplicité du graphisme qui synthétise formes et objets y contribuent. La scène est éclairée par une simple bougie plutôt que par un attribut allégorique. Le rideau qui borde le lit d’une part, et les ombres portées formées par les aplats de noir d’autre part, permettent à Vallotton de théâtraliser le moment qui conduit le président du Conseil Jules Méline, antidreyfusard, à une révélation qui le fait sortir de son sommeil : l’innocence de Dreyfus, clamée par Picquart. Vallotton crée une mise en abyme dans le recueil de planches : il emboîte le procès de Dreyfus (objet de son dessin) dans celui de Picquart (objet de l’album), donnant ainsi relief et profondeur à l’Affaire. L’inscription ‹ il est innocent › semble flotter sur la surface du dessin, c’est-à-dire hors de l’espace iconique, ce qui lui confère une valeur de vérité générale. Tournée vers le personnage, autrement dit renversée, l’inscription correspond en outre autant au discours énoncé (ou plutôt au cri proféré) par Picquart qu’au discours intérieur de Méline. La gravité de la révélation est accentuée par l’attitude du personnage traduite par les lignes : buste redressé, bouche ouverte, yeux écarquillés, bras en avant. Elle prend une valeur plus générale encore. ‹ Il est innocent › : cette formule est en effet polyphonique, elle résonne entre autres avec le titre d’une célèbre affiche de 1898 (Dreyfus est innocent) ou encore avec le titre d’une lithographie (Histoire d’un innocent), lesquelles ont leur pendant antidreyfusard où prime le mot ‹ traître ›. Cette formule résume à elle seule l’ensemble du discours dreyfusard. » (pp. 180-181).
Chaque exemplaire de l’album renferme douze lithographies originales réalisées par autant d’artistes. Suivant la justification du tirage donnée dans l’ouvrage, les exemplaires de luxe, numérotés de 1 à 50, contiennent des épreuves signées sur Japon impérial, tandis que les 250 exemplaires de souscription, numérotés de 51 à 300, comportent des épreuves sur Hollande.
Monogrammé au centre
Il est innocent
A. Félix Vallotton, dessin préparatoire pour [Il est innocent], 1899, crayon noir, encre de Chine, sépia et gouache sur papier, 37,3 x 26 cm, Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne. Acquisition avec un crédit supplémentaire de l'État de Vaud, 1997. Inv. 1997–088
Crédit photographique : ____
Droits : ____
Non cité
Non cité
Godefroy, 1932, no 54
Vallotton et Goerg, 1972, no 55, p. 61
St-James, 1979, [p. 8]