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Entre 1903 et 1914, Félix Vallotton contribue à l’illustration de trois séries de cartes postales engagées politiquement sur les thèmes de l’antimilitarisme (ici), du désarmement et de la guerre.

Les deux premières cartes qu’il dessine montrent l’une un soldat brutalisé par un officier, l’autre un soldat devant un tribunal militaire. Elles font partie d’un ensemble de dix-huit cartes postales antimilitaristes intitulé À bas la justice militaire ! Édité par la Ligue Internationale pour la défense du soldat, il comprend trois séries : Leur Discipline, Leur Code, Leur Justice. Les dix-huit dessins sont l’œuvre de Jules Hénault (3), Hermann-Paul (3), Henri-Gabriel Ibels (2), Gustave Jossot (3), František Kupka (1), Auguste Roubille (3), Theophile Alexandre Steinlen (1) et Félix Vallotton (2). La date exacte de diffusion n’est pas spécifiée, mais les trois dessins de Jossot sont datés « 1903 » à côté de la signature.

Début 1905, dix-sept des dix-huit cartes postales sont imprimées à Épinal en noir et rouge, le garance des uniformes français, dans deux plaquettes de format A3 : l’une, où manque une carte de Hermann-Paul, contient huit cartes au format paysage (fig. B), l’autre les neuf cartes au format portrait (fig. A).

La pochette renfermant les cartes (fig. A) et deux plaquettes fournissent des informations plus générales sur cette série. Son éditrice, l’éphémère Ligue Internationale pour la défense du soldat a été créée en 1902, dans le courant des mouvements libertaires antimilitaristes. Son siège était situé à Paris, 14, rue d’Uzès, auprès de la rédaction du quotidien L’Action quotidienne anticléricale-républicaine-socialiste. Elle avait pour trésorier le syndicaliste Jean Allemane (1843-1935) et pour secrétaire général Georges Lhermitte (1867-1943). Cet ancien collaborateur de Clemenceau à L’Aurore est l’auteur d’un ouvrage intitulé À bas la justice militaire, publié en 1904 à la Librairie de « La Raison », dont l’adresse à Paris, était celle de la Ligue Internationale pour la défense du soldat.

Pochette et plaquettes portent les revendications suivantes : « Par la Justice ! / Pour l’Humanité ! / Vers la Paix Universelle ! / À bas la Justice Militaire ! / En attendant / la suppression des armées permanentes nous voulons / La Justice pour tous : / Abolition de la Justice militaire ; / L’humanité pour tous / Abrogation de la loi de 1831 sur les réformes militaires et extension aux citoyens soldats du bénéfice de la loi sur les accidents du travail ; / L’égalité pour tous : / Abrogation de la loi de 1834 sur la propriété des grades. / À bas la Justice Militaire ! ». Autant d’exigences qui resteront vœux pieux. La pochette liste également les fonctionnaires auxquels les cartes de propagande doivent être envoyées sans affranchissement postal.

La parution des plaquettes est saluée le 3 février 1905 dans L’Humanité : « Sous ce titre : À bas la justice militaire, notre confrère G. Lhermitte – secrétaire général de la Ligue – vient de réunir en plaquettes éditées sous la forme d’images d’Épinal, tirées à Épinal même, dix-huit dessins de nos meilleurs caricaturistes, Steinlen, Jossot, Roubille, Hermann-Paul, Ibels, Vallotton, Henault et Kupka. L’effet produit est saisissant. Chaque dessin rappelle une iniquité, un crime. Et jamais peut-être réquisitoire plus virulent ne fut dressé en quelques mots contre la justice militaire dont nous réclamons en vain depuis 1898 l’abolition. Ces images, dont le caractère artistique n’a d’égales que la précision et la netteté des arguments qui soulignent les dessins, sont appelées au plus grand succès. » (Non signé, « Par l’image », L’Humanité, 3 février 1905).

«Dessin de F. Vallotton»

La carte postale mesure 9 x 14 cm

Légende: «–Fils de p..., tu ne sais donc pas de quel côté est ta gauche.»

«Les membres de la hiérarchie militaire doivent avoir envers leurs inférieurs tous les égards dus à des hommes dont la valeur et le dévouement procurent leurs succès et préparent leur gloire» (Service intérieur). / Ex. Aff. Giraud, lieutenant, C. de g. d'Oran, Juin 1903. Brutalités révoltantes envers ses inférieurs. Acquittement. / À bas la justice militaire!

Non cité

Non cité

Non signé, «À bas les conseils de Guerre!», L'Aurore, 1^er février 1905.

Non signé, «Par l'image», L'Humanité, 3 février 1905.