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No catalogue 097000
[Dessin Gala Peter, réclame pour chocolat]

Titre
[Dessin Gala Peter, réclame pour chocolat]
Sujet
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Spécifications liées au titre
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Type d’objet
Publicité
Statut
Inédit
Date
1904 (2 Avril)
Remarques

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Commentaire

Le projet publicitaire que Vallotton réalise pour le chocolat Gala Peter nous est connu par deux mentions – l’une au Livre de comptes, l’autre dans une lettre de Félix à Paul Vallotton. Un effort d’imagination est donc exigé pour se représenter sa forme, un effort facilité toutefois par la très précise description qu’en fait le plus jeune des deux frères en avril 1904. Trois ans après un premier « coup » de réclame pour le chocolat Kohler, les voici à nouveau complices d’une publicité pour le compte du chocolatier.

Paul Vallotton est en effet cadre supérieur de la maison Kohler lorsque celle-ci fusionne, en 1904, avec la maison Peter à Vevey, spécialisée depuis 1875 dans la fabrication du chocolat au lait, une invention due à son fondateur Daniel Peter (1836-1919). La jeune « Société Générale Suisse de Chocolats Peter et Kohler » signe alors, et pour une période de 99 ans, des accords avec la Société Anonyme Henri Nestlé.

« Le Gala Peter », tel qu’il apparaît dans la correspondance des Vallotton, est une barre chocolatée pour laquelle Félix dessine l’annonce. « J’ai comme tu le verras pris une lettre qui resterait fixe et dans laquelle pourraient s’intercaler des dessins indéfiniment renouvelés. – J’en ai fait deux ; très différents, et pourrais en faire 6, 8 ou 10 selon ce qu’il faudrait – Tu pourras juger de l’effet en les appliquant en transparence contre une vitre », écrit-il sur le ton d’un mode d’emploi, preuve de son implication technique et créative dans la commande (Documents II, p. 77). Sur ce point, il précise être prêt à réaliser les « clichés » demandés à condition que le projet publicitaire soit une commande ferme, et non pas un concours d’idées. « [F]aire des essais est une chose à laquelle j’ai renoncé. – Il faudrait, si ces messieurs estiment que je puis faire leur affaire, qu’ils s’en remettent à moi. Je ne puis pas faire des dessins qui risqueraient de me revenir après avoir été mis en concurrence avec ceux de telle ou telle maison – Je te dis ceci entre nous. – » (Documents II, p. 77).

Suit alors un raisonnement, entre la confidence et la profession de foi, qui met en regard la besogne et l’œuvre d’art : « Ce que je fais sort d’une marque, c’est même un des seuls bénéfices que j’en aie, puisque je n’ai jamais consenti, (ni pu d’ailleurs), à faire des besognes – À l’âge que j’ai, et plus que jamais, je considère que toute minute qui n’est pas consacrée à faire œuvre d’art est du temps perdu, je veux bien en supporter toutes les conséquences, mais c’est une attitude à laquelle je tiens. » Vallotton a conscience de la valeur instantanément reconnaissable de son travail publicitaire, et en cela, il estime ce type de labeur comme il l’a déjà démontré dans les dessins pour L’Eau de la vieille, la maison Kohler ou encore la fonderie Colin. Il ne rechigne pas à consacrer du temps au dessin d’une lettre et d’une mise en page à des fins commerciales ou d’identité graphique. Il déclare même : « Ce genre de travaux ne me déplaît pas du tout, et m’amuse au contraire, je pourrais même dire qu’ici, et même ailleurs, je passe pour être un des maîtres, et en tout cas l’initiateur du genre ; c’est dire que je sais de quoi il retourne. – Je te dis ceci, pour qu’en cas où on te laisserait entendre que tel travail m’est confié parce que je suis ton frère, tu sois tranquille pour répondre. » (Documents II, p. 78). Pour balayer tout soupçon de favoritisme, Vallotton souligne ici deux aspects importants de sa pratique typographique, lovés dans une progression des termes allant de la modestie à l’affirmation de soi – « un des maîtres » [de la lettre dessinée], « initiateur du genre » [du dessin publicitaire], il sait qu’il a développé une marque de fabrique. C’est bien la marque Vallotton que s’achètent, en définitive, les marques. La lettre dessinée de Vallotton fait marque.

Vallotton change alors brièvement de sujet, pour mentionner en deux phrases sa prochaine exposition à la galerie Bernheim, puis porte à nouveau son attention sur le projet sous pli : « Je repense à une chose. – Si ce que je fais convient à ta maison, ne crois-tu pas qu’il serait possible de m’affermer ce département des dessins ? Ce serait pour tous un avantage, et je pourrais alors éventuellement combiner soit des séries, soit d’autres formes qui me paraîtraient plaisantes, il n’y aurait guère que les choses en couleurs [Vallotton souligne] pour lesquelles je me récuserais, étant donné que les professionnels ont un tour de main et un goût que je n’ai pas pour ces machines-là ?... Penses-y et vois venir le vent. » L’appel d’air et d’imaginaire est tel que Vallotton se voit soudain à la tête d’un « département des dessins » pour la maison Peter Kohler, à décliner des formes « plaisantes », en collaborant avec des lithographes – en somme, à reproduire avec la sécurité d’un revenu fixe le même métier d’illustrateur auquel il s’adonne depuis dix ans, avec un enthousiasme que l’on perçoit à l’idée de se rapprocher du métier de son aîné.

La fin de la lettre aborde la rémunération, puis revient rapidement à des considérations techniques et esthétiques de la lettre dessinée : « J’ai fait ce premier dessin plutôt clair. Il y a maintenant un tel abus de placards noirs que ça le relèverait. – Les lettres ‹ Gala Peter ›, pourraient éventuellement être remplies mais je ne sais pas si ça gagnerait. » (Documents II, p. 78). Vallotton se montre très au fait de l’imagerie publicitaire existante, cherche à s’en détacher, et paraît avoir réfléchi au positionnement commercial de la marque via différentes options de caractères. Il signe « Ton dévoué frère [Fé]lix » et paraphe une dernière mention, pragmatique : « Si l’affaire n’a pas de suite retourne-moi, ou conserve-moi les dessins. » (Documents II, p. 78). La destinée de ces dessins nous reste aujourd’hui inconnue.

Paul, quant à lui, sera appelé peu de temps après à la direction d’une maison concurrente, la fabrique de chocolats Cailler, à Broc (Ducrey, 2005, p. 365). Il y restera de 1905 à 1913, le temps de voir les trois entreprises fusionner à leur tour en la « Société Peter, Cailler, Kohler, Chocolats Suisses S. A. » en 1911. Il s’orientera ensuite vers une autre profession, celui de galeriste, ouvrant d’abord à Lausanne une succursale de la galerie Bernheim-Jeune de Paris (1913-1922) avant d’établir sa propre galerie d’art en 1923, restée dans la famille jusqu’en 2005 (voir Marina Ducrey, « Paul Vallotton », in Dictionnaire historique de la Suisse). Le destin des frères Vallotton se nouera alors non plus autour du chocolat, mais bien de l’art.

Sarah Burkhalter


Lieu de publication
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Mentions relatives à l’illustration
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Maison d’édition
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Imprimeur·s
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Emplacement
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Format
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Composition
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Couleur
Noir et blanc
Notes
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Technique de reproduction
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Gravure/photogravure
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Papier
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Signature
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Autre·s mention·s sur l’illustration
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Autre·s mention·s en marge de l’illustration
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Remarques
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Image de comparaison
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Livre de raison

Non cité

Livre de comptes

1904

«Dessin Gala Peter, réclame pour chocolat 100»

Honoraires
100 Francs

Bibliographie
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Reprise·s
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Localisation du document décrit
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Notes
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