No catalogue 070000
Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Philipp Hitz)
Droits : Réservés
La date de parution se situe entre le 15 et le 27 novembre 1898 (selon les annonces parues dans La Revue blanche et Le Cri de Paris)
Intimités, sa célèbre et aujourd’hui rarissime suite de dix bois gravés, est l’expression la plus aboutie de la synthèse décorative mise en œuvre par Vallotton et le couronnement de ses recherches graphiques. Elle paraît fin 1898 en tirage limité à trente exemplaires aux Éditions de La Revue blanche. Chacune des dix planches – à considérer séparément – réunit un homme et une femme dans le décor d’un intérieur bourgeois. Parfois ambiguë, leur relation peut prêter à des interprétations divergentes, mais il se dégage de l’ensemble un sentiment de grande noirceur. Les aspects les plus sombres de la vie sentimentale et conjugale, avec la tromperie en leitmotiv, y sont déclinés avec une ironie cynique et pessimiste, habilement véhiculée par le dialogue entre l’image et le titre, toujours inclus dans la planche.
Aucune lettre ne subsiste qui permette de documenter les conditions de réalisation de cette suite. La première annonce de parution, publiée dans La Revue blanche le 15 septembre 1898, apporte toutefois de précieuses informations : « Pour paraître prochainement / INTIMITES / PAR / FELIX VALLOTTON / Une suite de dix planches originales gravées sur bois. / Tirage garanti à trente épreuves, toutes numérotées et signées à la main. / Cinq exemplaires sur Japon 250 fr. / Vingt-cinq exemplaires sur vélin 150 fr. / Cette publication de grand luxe est la première que donne cet artiste à tirage aussi réduit. Chaque épreuve sera présentée sous passe-partout ; la collection sera enveloppée dans un élégant carton, timbré par l’artiste. / Les planches originales seront détruites et une épreuve de garantie accompagnera chaque collection. / Les souscriptions seront reçues aux bureaux de La Revue blanche, 1, rue Laffitte. »
L’élégant carton annoncé fait partie intégrante de la série Intimités. Vallotton l’a habillé de lettres dessinées de sa main, formant le titre dans un style japonisant. Contrairement aux couvertures créées pour les séries d’estampes Immortels passés, présents ou futurs et Paris intense, aucune image ne figure aux côtés des mots « Félix Vallotton / Intimités / Éditions de La revue blanche ». Ils ont sans doute été appliqués à l’aide d’un pochoir, à la main et non par un procédé de reproduction photomécanique, sur les trente exemplaires du carton à dos et lanières en tissu.
Thadée Natanson, l’un des fondateurs de La Revue blanche, qualifie de « chef-d’œuvre » la suite de son ami Vallotton : « Jamais la maîtrise du graveur n’avait éclaté avec plus d’aisance », s’extasie-t-il (Thadée Natanson, « Petite gazette d’art. De M. Vallotton », La Revue blanche, 1er janvier 1899, pp. 74-75).
Après la présentation publique de la série, Vallotton écrit à son frère début 1899 : « Mon exposition a pas mal marché, j’ai un petit peu vendu, et n’en espérais pas plus, elle a eu l’effet que j’en attendais, et j’ai des amateurs tout prêts, il n’y a qu’à produire » (Documents, vol. I, lettre 126, p. 188). Toutefois, l’artiste ne cède pas à la facilité : alors que, parvenu au sommet de son art, il pourrait fidéliser une clientèle conquise, il décide de renoncer à la xylographie pour se consacrer entièrement à la peinture : « Je m’affaire de mon mieux et fais de la peinture exclusivement, c’est mon plus grand plaisir, et je compte bien un jour ou l’autre en tirer parti », écrit-il à son frère (lettre du 31 décembre 1898, in Documents, vol. I, lettre 123, p. 182). Il reviendra brièvement sur sa décision en 1900 pour graver L’Exposition universelle, une série de six planches destinée au périodique new-yorkais The Century Illustrated Monthly Magazine.
Le carton plié mesure 54 x 44,5 cm
Le titre fait partie intégrante de l'illustration.
Non cité
Non cité
Vallotton et Goerg, 1972, p. 203