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Illustrations de périodique

No catalogue 073001

Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Philipp Hitz)

Droits : Réservés


Sans titre [Cyprian Barballe 1]


Titre

Sans titre [Cyprian Barballe 1]

Légende
Sujet
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Parution dans
Numéro
Date
1899 (Décembre)
Page
p. 317
Emplacement
Corps du périodique
Relation illustration-texte

En relation avec le conte «Cyprian Barballe» de Gustave Kahn, traduit du manuscrit français par Otto Julius Bierbaum, Die Insel, décembre 1899, pp. 307-358 [«Cyprian Barballe. Von Gustave Kahn. Aus der Handschrift übersetzt von O. J. B. »].


Commentaire

« Cyprian Barballe » est la traduction allemande du conte de Gustave Kahn (1859-1936) effectuée par Otto Julius Bierbaum d’après un manuscrit de l’auteur et critique d’art français. La version française de ce conte est publiée légèrement remaniée sous le titre « L’Héritage » en 1901 en deux livraisons dans La Nouvelle revue (en mai aux pages 379-393, en juin aux pages 597-609), puis en 1903 dans un recueil intitulé Contes Hollandais (Paris : Eugène Fasquelle, 1903, pp. 115-169). Les deux éditions françaises ne sont pas illustrées. Le texte publié dans la revue munichoise Die Insel en décembre 1899 peut donc être considéré comme une sorte de publication en préoriginale.

En 1902, Bierbaum republiera « Cyprian Barballe », avec les trois illustrations dues à Vallotton, dans le livre Insel-Buch (pp. 1-78), à côté d’autres textes qui lui semblent exemplaires et illustrent le sens ainsi que la valeur du contenu de la revue Die Insel. Puis, en 1908, il présentera une libre adaptation de la nouvelle sous le titre « Steingut » dans le livre Sonderbare Geschichten (Munich/Leipzig : Georg Müller, 1908, pp. 3-73), cette fois-ci sans les illustrations de Vallotton.

En ce qui concerne le présent projet de publication, plusieurs questions restent en suspens. Nous ne pouvons par exemple pas expliquer pourquoi le conte est diffusé au public en allemand avant d’être publié en français. Nous ignorons par quel biais Otto Julius Bierbaum entre en possession du manuscrit de Gustave Kahn. Est-ce à travers le peintre et illustrateur belge Georges Lemmen (1865-1916) qui crée et contrôle l’ensemble de la conception graphique des trois premiers fascicules de la revue Die Insel et qui est un ami de longue date du poète symboliste français ? Est-ce par Félix Vallotton qui connaît bien, lui aussi, ce collaborateur de La Revue blanche et dont il a réalisé en 1896 le portrait pour Le Livre des masques ? Ou est-ce que le contact entre les deux écrivains remonte à l’époque de Pan, quand la revue berlinoise publie en 1895, dans son premier numéro du supplément français, certains vers de Gustave Kahn ?

En outre, se pose la question de la rémunération : ni le Livre de raison ni le Livre de comptes ne mentionnent sous l’année 1899 la revue Die Insel ou les noms des éditeurs Otto Julius Bierbaum, Alfred Walter Heymel ou Rudolf Alexander Schroeder. Dans ces deux sources figure cependant, sous cette même année, une ligne qui ne peut être attribuée à aucun autre projet d’édition et qui pourrait convenir ici. Elle est libellée comme suit : « dessins illustrations p Meyer [sic] Graefe » avec la mention dans le Livre de comptes d’un honoraire de 180 francs (voir ici). D’une autre entrée du même document, faite sous l’année 1900, nous apprenons que Félix Vallotton touche de la part de la revue munichoise 300 francs pour l’illustration de la nouvelle « Rakkóx der Billionaer » de Paul Scheerbart, ce qui signifie qu’il est payé 60 francs le dessin. Pour « Cyprian Barballe » de Gustave Kahn, l’artiste réalise trois dessins – ce qui équivaut donc, par analogie, à 180 francs et correspond à la somme reçue en 1899 par Julius Meier-Graefe. Cette hypothèse peut être appuyée par le fait que Meier-Graefe était le conseiller attitré de la revue Die Insel pour tout ce qui touchait à l’art et jouait ainsi un rôle de cheville ouvrière pour les relations avec la France (voir la lettre de Julius Meier-Graefe à Otto Julius Bierbaum, datée du 7 juillet 1899, publiée dans Julius Meier-Graefe. Kunst ist nicht für Kunstgeschichte da. Briefe und Dokumente, Catherine Kramer [éd.], Göttingen : Wallstein Verlag, 2001, p. 57).

« Cyprian Barballe » est l’histoire d’un jeune poète et étudiant français qui trouve, au travers d’un héritage concédé par un vieil oncle amateur de porcelaine aux Pays-Bas, sa vocation de marchand de faïence ainsi que sa future épouse. C’est aussi une histoire fantasque, où des objets s’animent la nuit comme par magie, des morts font des apparitions et le quotidien se révèle de plus en plus extraordinaire.

Cette illustration est la première des trois qui accompagnent le texte. Elle montre deux hommes assis à une table drapée d’une grande nappe à carreaux. Sur la table sont disposées de manière éparse quelques objets, dont trois assiettes et deux chopes de bière. Au premier plan, un chat blanc vient jauger la situation sans être pris en considération par les deux hommes. L’arrière-plan se perd en un noir profond qui nie l’espace euclidien. Il est interrompu, ici et là, par des dossiers de chaise, quelques plaques murales (d’applique en faïence de Delft) ainsi que par une horloge. L’homme vu de face qui a une serviette autour du cou regarde devant lui, d’un air sérieux. Sa main droite est posée sur la table, tandis que son bras de gauche pointe vers le haut, l’index levé. Ce geste le place au centre de l’action ; il a quelque chose à dire. L’homme vu de profil qui s’accoude sur la table regarde lui aussi devant lui. Il est plus jeune que son interlocuteur et semble perdu dans ses pensées, en l’écoutant que d’une seule oreille.

Le récit permet de clarifier et de contextualiser l’image. La scène illustrée se déroule dans le réfectoire de l’hôtel de la Tulipe, où Cyprian Barballe fait la connaissance de Van Speterskerke et suit avec attention et quelque peu stupéfait les déclarations de ce vieil antiquaire et marchand de tabac qui s’avère avoir été un ami proche de feu son oncle.

L’illustration de Félix Vallotton qui occupe une pleine page précède l’épisode auquel elle se réfère. Le primat étant ainsi donné au visuel, l’image ne dédouble pas seulement le contenu du texte, mais propose aussi une première interprétation de la vision de l’écrivain. En intégrant à la composition à la fois des éléments qui ne trouveront des significations que dans un second temps (comme par exemple les fantômes de plaques murales) ou qui sont une pure émanation de son imagination (comme le chat blanc), Vallotton trace des pistes qui aident à pénétrer davantage dans l’histoire racontée et font résonner son atmosphère. Ainsi, on peut dire que l’image est ici, certes, au service de la lettre, mais qu’elle va aussi plus loin : elle fait office de porte d’entrée, permettant l’immersion dans l’univers du protagoniste Cyprian Barballe.

La composition de Vallotton peut surtout être mise en relation avec les passages suivants du conte : « Mais comme il passait devant l’hôtel de la Tulipe, qui était situé à peu près en face de sa porte, il vit la face joyeuse de l’hôtelier s’animer et les deux mains croisées se tendre vers lui, en signe d’appel amical, et un ‹ Entrez, je vous prie ›, le plaça en deux secondes devant un verre de bitter et de genièvre mêlés, plus un quidam [Van Speterskerke] couleur de bitter, de brique, de hâle, que l’hôtelier lui présenta comme un des meilleurs amis de Jacob Van Turlure [l’oncle défunt]. – Oui, Monsieur, dit le quidam, j’ose dire que Van Turlure et moi, nous fûmes des amis. » (Gustave Kahn, « L’Héritage », Contes Hollandais, Paris : Eugène Fasquelle, 1903, pp. 126-127) ; « […] il a trouvé ainsi chez moi un très beau pot de faïence de Strasbourg, qui fut sa fierté. Ce n’était pas la mienne, je n’y aurais jamais rien vu que d’ordinaire, mais à lui, les poteries lui parlaient ; au moins, il les frappait d’un petit coup de son index et il écoutait. » (Ibid., p. 130) ; « Quoique cette assertion le surprît, Cyprien Barballe écoutait se modeler la légende de l’oncle, d’après ces anecdotes et d’autres moins importantes que lui servit en déjeunant M. Van Speterskerke. » (Ibid., p. 131).

Nadine Franci


Format
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Composition
Circonscrite dans un rectangle
Couleur
Noir et blanc
Technique de reproduction
Dessin reproduit par procédé photomécanique
Gravure/photogravure

Non spécifié

Signature

Monogrammé en bas à droite

Autre·s mention·s sur l’illustration
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Autre·s mention·s en marge de l’illustration
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Autre·s mention·s dans la publication

«Mit drei Vollbildern von F. Vallotton», dans le sommaire du volume

Remarques
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Image de comparaison
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Livre de raison

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Livre de comptes

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Honoraires
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Bibliographie

Ducrey, 1995, pp. 32-33.

Heichhorn, 2003, p. 139.


Reprise·s

Insel-Buch, Otto Julius Bierbaum éd., Leipzig, Insel-Verlag, 1902, p. 17.


Liens

Intitulé «L'Héritage», le conte en sa version française, tel que publié dans Contes hollandais (Paris, Eugène Fasquelle, 1903) est consultable dans son intégralité sur Gallica.


Fiche liée
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