D'après une lettre de Rudolf Alexander Schroeder à Otto Julius Bierbaum datée du 21 août 1899, le premier numéro de la revue ne sortira pas « avant le 22 octobre [1899] » (lettre citée d'après Rudolf Borchardt – Alfred Walter Heymel – Rudolf Alexander Schröder. Eine Ausstellung des Deutschen Literaturarchivs im Schiller-Nationalmuseum Marbach am Neckar 1978., cat. exp., Bernhard Zeller (éd.), Marbach : Deutsche Schillergesellschaft, 1978, p. 85).

Le dernier numéro est un numéro double.

La revue munichoise Die Insel est fondée en 1899 par Otto Julius Bierbaum (1865-1910), Alfred Walter Heymel (1878-1914) et son cousin Rudolf Alexander Schröder (1878-1962). Trente-six numéros de ce mensuel littéraire et artistique paraîtront jusqu’en 1902. Le logo de la revue, un deux mâts toutes voiles dehors (fig.), y apparaît dès le premier numéro en impression et en filigrane dans le papier. Conçu par Peter Behrens (1868-1940), il est aujourd’hui encore celui de la maison d’édition Insel Verlag, née en 1901 dans la foulée du périodique.

Les fondateurs nourrissent de hautes ambitions quant à la présentation et au contenu de leur publication. Ils visent la perfection typographique ; optent pour l’unité de sujet à l’intérieur de chaque numéro, renonçant ainsi au tirage de planches hors-texte sur un papier différent ; adoptent l’idée d’une double page conçue comme une œuvre d’art, sans interférence de texte superflu sur le modèle de William Morris ; et enfin, se proposent de confier chaque trimestre à un autre artiste la conception des numéros, ce qui ne manque pas de créer des litiges entre les supporters de tel artiste et ceux de tel autre. Bierbaum exerce une forte influence sur les premiers numéros et notamment sur le choix des auteurs, qui changent aussi. Par conséquent, dans la deuxième et la troisième livraison, Richard Dehmel, Paul Verlaine, Gustave Kahn et Robert Walser, entre autres, succèdent aux auteurs de la première livraison : Rudolf Alexander Schröder, Paul Scheerbart et déjà Robert Walser. Toutefois, le succès espéré n’est pas au rendez-vous. Le nombre d’abonné·e·s stagne et une tentative de fusion avec Pan échoue en avril 1900, trois mois avant la liquidation de cette revue concurrente.

Sans doute engagé par Bierbaum, dont il illustre déjà des livres en 1896, Vallotton collabore à Die Insel du troisième au dernier numéro. Ses 28 contributions sont toutes reproduites en pleine page, sauf une (voir ici). En décembre 1899, il réalise trois illustrations pour « Cyprian Barballe », de Gustave Kahn (voir la première, la deuxième, et la troisième). En février 1900, il innove dans la composition de cinq dessins qu’il exécute pour la nouvelle hallucinée de Paul Scheerbart « Rakkóx der Billionär. Ein Protzenroman » (voir le premier, le deuxième, le troisième, le quatrième, le cinquième). Un seul sera repris dans la publication du roman en volume à fin 1900. Un portrait de Friedrich Nietzsche paru en novembre 1900 est suivi de janvier à juin 1901 de sept dessins représentant chacun une femme nue, le plus souvent dans un intérieur (voir le premier, le deuxième, le troisième, le quatrième, le cinquième, le sixième, le septième). Dans quatre numéros consécutifs, publiés d’octobre 1901 à janvier 1902, sont reproduites quatre des six xylographies de la suite L’Exposition universelle (voir [Le Feu d'artifice], [Le Déjeuner en plein air], [Rue d'Alger], [L'Averse]), initialement parues en novembre 1900 dans The Century Illustrated Monthly Magazine. Enfin, en août-septembre 1902, le tout dernier numéro de la revue reprend huit des neuf dessins représentant divers métiers d’art préalablement parus dans Documents sur l’art industriel au XX^e siècle, ouvrage publié en 1901 par Julius Meier-Graefe pour La Maison moderne.

En juillet 1901, Henri Albert consacre une page à Die Insel dans la « Revue du mois » du Mercure de France : « Die Insel a encore fait paraître quelques intéressants fascicules. Cette publication, qui tâtonna beaucoup pendant sa première année, accentue de mois en mois sa belle tenue. Nous y verrons collaborer tout ce qui, en Allemagne, participe de la culture européenne […]. » Et le germaniste, traducteur de Nietzsche, de conclure, non sans remarquer les femmes nues au trait par Vallotton : « De très subtils hors-textes de Georges de Feure, des dessins au trait de Vallotton et des bois de E. R. Weiss agrémentent ces livraisons curieuses à tous points. »

Nadine Franci et Katia Poletti

1899LRZ414

« dessins illustrations p Meyer [sic] Graefe »

puis en 1900 :

LRZ 425 : « Dessins p Revue Insel »

puis en 1901 :

LRZ 470 : « Six gravures sur bois sur l’Exposition universelle. p. Insel »

1899

« dessins illustrations p Meyer [sic] Graefe 180 »

puis en 1900 :

« Dessins p. la Revue Insel 300 »

puis en 1901 :

« pour six bois sur l’Exposition reproduits dans Insel 200 »

Ducrey, 1995, p. 30, 32

Heichhorn, 2003, p. 139

Klaus Schöffling, Die ersten Jahre des Insel Verlags 1899–1902. Begleitband zur Faksimileausgabe der Zeitschrift «Die Insel», Francfort-sur-le-Main : Insel Verlag, 1981

Kurt Ifkovits, Die Insel. Eine Zeitschrift der Jahrhundertwende, 2 vol, Thèse de doctorat, Université de Vienne, 1996

Heinz Sarkowski (éd.), Der Insel Verlag 1899-1999. Die Geschichte des Verlags 1899–1964, Francfort-sur-le-Main, Insel Verlag, 1999