No catalogue 030037
Crédit photographique : © Fondation Félix Vallotton / SIK-ISEA (photographie : Philipp Hitz)
Droits : Réservés
Sans titre [L'Essai de vivre 1]
Sans titre [L'Essai de vivre 1]
En relation avec le texte de Paul Adam, « L'Essai de vivre », pp. 76-86.
Paru en feuilleton inachevé dans les numéros de juillet et d’août 1895, « L’Essai de vivre » de Paul Adam (1862-1920) est le texte le plus richement illustré par Vallotton pour la Revue franco-américaine. Il est aussi l’unique texte littéraire pour lequel il réalise des dessins, douze au total, exemplaires des dix-huit illustrations de type narratif que Vallotton livre à la revue (à ce propos, voir ici).
Les vignettes offrent une physiognomie aux personnages imaginés par l’écrivain symboliste, alors déjà prolifique dans la description des mœurs françaises. « L’Essai de vivre » ne fait pas exception : on y suit la journée de six sœurs, les princesses de Stittburg, « […] minuscule ville illustre pour l’enseignement de son université où Fichte professa […] » (p. 79). Issues d’une lignée royale imaginaire mais néanmoins campée dans l’Europe hanséatique, Bertha, Clotilde, Stéphanie, Marguerite, Pauline et Gertrude von Stittburg sont au garde-à-vous devant leur gouvernante, Madame Bläde, lorsque s’ouvre la nouvelle. Dans l’image considérée ici, Vallotton choisit d’illustrer la première phrase de l’essai : « Des six petites filles en pareil uniforme de tabliers noirs à fleurettes, la gouvernante passait la revue matinale. » (p. 76). Placées côte à côte par ordre d’âge et de grandeur, on comprend que le rang royal des fillettes se travaille et se cisèle comme un exercice militaire, le tablier fleuri porté tel un uniforme.
Vallotton illustrera quatre autres épisodes pour le numéro de juillet (voir épisode 2, épisode 3, épisode 4, épisode 5) et sept pour celui d’août (voir épisode 6, épisode 7, épisode 8, épisode 9, épisode 10, épisode 11 et épisode 12) 1895. Le texte est justifié par rapport aux scènes et portraits, conférant à la mise en page une adhérence étroite entre texte et image. Il est évident que Vallotton se plaît à pousser les traits caricaturaux de la vie royale régie par des convenances souvent cruelles – ainsi des altesses debout et assises en escalier, la gouvernante sévère au regard aveugle derrière ses lunettes opaques ou encore le prince chancelier à la mine de bouledogue.
Les termes exacts de la commande ne sont pas connus, et Vallotton ne laisse aucune note quant à une concertation éventuelle avec Adam. Qu’ils aient été familiers l’un de l’autre est attesté du fait que Vallotton dessine deux masques d’Adam, l’un paru dans La Revue blanche en juillet 1895, l’autre dans la Revue des revues en 1896.
L’essai d’Adam s’interrompt au moment où cesse la revue, à la fin août 1895. Bien que ponctué de l’indication « à suivre », il ne connaîtra pas d’autre tribune, la Revue franco-américaine demeurant son premier et unique vecteur. Il apparaît toutefois que l’essai était promis à devenir un roman puisque dans une lettre adressée à Vallotton le 20 septembre 1895, Adam exprime son désarroi d’en avoir perdu le manuscrit :
« Cher Monsieur, / Avez-vous reçu à Lausanne la fin du roman L’Essai de Vivre que je vous y adressai ? / Je réclame à tous les échos ce papier. Vainement. Me pardonnerez-vous de venir vous ennuyer ainsi ? Mais je ne possède pas le double du manuscrit, et, si on ne le retrouvait point, ce serait un désastre. Pourriez-vous me donner quelques nouvelles ? / Pardon encore. / Votre admirateur dévoué / Paul Adam » (Documents, vol. I, lettre 69, p. 131). Nous ignorons si Vallotton a pu le rasséréner.
Non monogrammé
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